
(Green And Health News) – Le 20 mars 2024, six employés ont perdu la vie sur la plateforme offshore Becuna de Perenco au Gabon, dans un incendie évitable selon plusieurs témoignages. Un an après les faits, un rapport accablant de l’Environmental Investigation Agency révèle de graves négligences de sécurité et une gestion opaque de la crise. Une seule famille, celle d’une victime française, aurait été indemnisée.
Le 20 mars 2024, un incendie s’est déclaré lors d’une opération de reconditionnement sur la plateforme pétrolière offshore Becuna, exploitée par la société française Perenco au large du Gabon. Le sinistre a coûté la vie à six travailleurs. Pourtant, l’événement est resté largement ignoré du grand public jusqu’à la publication, en mai 2025, d’un rapport de l’Environmental Investigation Agency (EIA), une ONG américaine spécialisée dans les crimes environnementaux.
Selon l’EIA, des employés avaient émis plusieurs alertes sur les conditions de sécurité de la plateforme quelques jours avant le drame. L’infrastructure était décrite comme vétuste, dangereuse, avec des fuites d’hydrocarbures au sol, des câbles non sécurisés et des accès bloqués. Une source anonyme du rapport affirme que « les mesures de sécurité primaires n’étaient pas respectées », évoquant un site totalement inadapté aux normes industrielles.
Pire encore, le rapport accuse le siège parisien de Perenco d’avoir demandé que les avertissements de sécurité soient retirés des rapports quotidiens. Il aurait également été demandé à l’équipe sur place de ne pas tenir compte des remontées de pétrole survenues deux semaines auparavant. Ces instructions auraient directement contribué à l’inaction qui a précédé le drame.
Parmi les six victimes, seule la famille de la victime de nationalité française aurait reçu une compensation – à hauteur de 10 millions de dollars – assortie d’un accord de non-divulgation. Les familles des victimes africaines, elles, n’ont, à ce jour, reçu aucun dédommagement. Un traitement inégal dénoncé par Luke Allen, responsable communication Afrique de l’EIA : « Nous appelons à une indemnisation équitable pour toutes les familles, sans distinction de nationalité. »
Georges Mpaga, président du réseau des organisations de la société civile pour la bonne gouvernance au Gabon, n’est pas surpris. Il dénonce une gestion prédatrice de Perenco : « Ils travaillent avec des sous-traitants non conformes, ignorent les règles de sécurité, ne paient pas les cotisations sociales… C’est une mafia organisée autour du pétrole. » Pour lui, il est urgent que le gouvernement prenne ses responsabilités.
Interrogée sur les conclusions du rapport, Perenco a refusé tout commentaire substantiel. « Le rapport contient de nombreuses allégations fausses et diffamatoires », a déclaré un porte-parole à Mongabay, tout en précisant que l’entreprise évaluait ses options juridiques.
Alors que le Gabon tente de réconcilier exploitation pétrolière et développement durable, l’affaire Becuna soulève de graves interrogations sur la responsabilité des entreprises étrangères et le respect des droits des travailleurs africains. Un an après, la quête de vérité et de justice reste plus que jamais d’actualité.
La Rédaction