Climat et justice : Des jeunes Américains défient Trump pour défendre leur avenir climatique

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Vingt-deux jeunes citoyens américains poursuivent l’administration Trump en justice, estimant que ses politiques pro-fossiles violent leurs droits fondamentaux garantis par la Constitution. Une bataille judiciaire emblématique, portée par la jeunesse, dans un contexte mondial d’activisme climatique croissant.

Le changement climatique s’invite une nouvelle fois dans les prétoires américains. Vingt-deux jeunes citoyens, emmenés par la militante Eva Lighthiser, ont décidé de traduire l’administration Trump devant un tribunal fédéral du Montana. Leur accusation : la politique pro-énergies fossiles de l’ancien président constitue une atteinte à leurs droits fondamentaux, notamment celui de vivre dans un environnement sain, garanti – selon eux – par le Cinquième amendement de la Constitution. Le slogan trumpiste « Drill, baby, drill », qui résume une stratégie énergique en faveur de l’exploitation des combustibles fossiles, est placé au centre du litige. Les plaignants estiment que ces décisions présidentielles accélèrent la crise climatique et compromettent irrémédiablement leur avenir.

À seulement 19 ans, Eva Lighthiser incarne la voix d’une génération inquiète. Originaire du Montana, près du parc national de Yellowstone, elle témoigne d’une jeunesse marquée par les catastrophes naturelles : ciel enfumé, inondations à répétition, déménagements forcés. Son combat est personnel autant que collectif. « Le climat est devenu imprévisible, déstabilisé, et cela ne va faire qu’empirer », déclare-t-elle à l’AFP. Une angoisse partagée par Joseph Lee, autre plaignant de 19 ans, dont l’enfance près d’une raffinerie en Californie a été marquée par de graves crises d’asthme. Après un exil sanitaire en Caroline du Nord, sa famille s’est retrouvée confrontée à de nouvelles catastrophes : les inondations. Ces jeunes sont représentés par l’association Our Children’s Trust, qui a déjà remporté deux batailles judiciaires locales, au Montana en 2023 et à Hawaï en 2024. L’organisation s’est spécialisée dans les recours climatiques portés par les mineurs.

Le recours s’appuie sur une lecture audacieuse du Cinquième amendement, qui protège les citoyens contre toute privation arbitraire de leurs droits fondamentaux par l’État. Pour l’avocat Me Mat Dos Santos, il s’agit d’étendre la notion de « droit à la vie » — déjà invoquée par la Cour suprême pour restreindre le droit à l’avortement — à l’environnement : « Chaque enfant a le droit de profiter de son existence sur Terre ». Mais la bataille s’annonce rude. La Cour suprême, dominée par une majorité conservatrice, a récemment montré son hostilité aux actions climatiques trop ambitieuses. Dix-neuf procureurs locaux se sont d’ailleurs portés volontaires pour soutenir l’État fédéral contre les jeunes plaignants, signal clair de l’ampleur du bras de fer judiciaire.

Cette affaire s’inscrit dans une vague internationale de recours juridiques liés au climat. Le 23 juillet, la Cour internationale de justice doit d’ailleurs rendre un avis crucial sur une affaire similaire, témoignant d’un activisme mondial coordonné face à l’urgence climatique. Aux États-Unis, certains experts comme le professeur Patrick Parenteau de la Vermont Law School comparent cette démarche à d’autres grandes batailles judiciaires du passé : la déségrégation raciale, le mariage interracial ou le droit à l’avortement. D’autres, plus sceptiques, y voient un militantisme déconnecté des réalités juridiques.

Pour Jonathan Adler, professeur de droit à William & Mary, « le changement climatique est un vrai problème, mais les stratégies juridiques conçues pour faire du bruit médiatique ne sont pas toujours les plus efficaces ».

Les plaignants savent qu’ils engagent un combat incertain. Mais pour eux, renoncer n’est pas une option. Face aux menaces environnementales qui pèsent sur leur avenir, ils veulent que le système judiciaire reconnaisse leur droit à un environnement vivable. « Ce sera un parcours du combattant », reconnaît Patrick Parenteau. « Mais le fait est qu’ils se doivent d’essayer. »

Dans un monde où la parole scientifique peine à infléchir les décisions politiques, la jeunesse tente une autre voie : celle du droit. Un recours, certes symbolique, mais qui pourrait devenir une jurisprudence historique.

La Redaction

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