Protection maternelle : Le chèque santé accélère la mise en œuvre de la CSU dans la région du Sud

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Lancé officiellement en avril 2023, le projet de Couverture Santé Universelle (CSU) a pris racine dans la région du Sud du Cameroun avec l’extension du chèque santé. Un an après, les résultats sont visibles malgré de nombreux défis. Charles Youpdoi, Délégué régional de la Santé publique, fait le point sur les progrès, les défis et les perspectives de ce dispositif de santé communautaire.

La Couverture Santé Universelle a été officiellement lancée le 12 avril 2023. Dans la région du Sud, elle a débuté par l’extension du projet pilote du chèque santé, initialement expérimenté dans les régions septentrionales du Cameroun (Extrême-Nord, Nord, Adamaoua). « Nous avons commencé avec deux districts de santé. Aujourd’hui, nous couvrons les 13 de la région », affirme Charles Youpdoi. L’objectif : permettre l’accès aux soins essentiels, notamment pour les femmes enceintes et les enfants de moins de 5 ans.

Le programme CSU dans le Sud s’articule autour d’un panier de soins prioritairement dédié à la santé maternelle et infantile. Pour une contribution forfaitaire de 6 000 FCFA, chaque femme enceinte bénéficie de consultations prénatales (au moins quatre), d’une échographie, du traitement préventif du paludisme, d’une moustiquaire et d’un suivi jusqu’au 42ᵉ jour après l’accouchement. En cas de complications (césarienne, hémorragie), l’évacuation et la prise en charge sont entièrement gratuites. D’autres prestations sont également offertes sans frais : consultations pour enfants de moins de 5 ans, traitement du paludisme, soins pour les personnes vivant avec le VIH ou atteintes de tuberculose. Le programme prévoit aussi une prise en charge de l’hémodialyse pour seulement 15 000 FCFA par an, contre un coût réel d’environ 550 000 FCFA. Les bénéficiaires peuvent ainsi recevoir trois séances par semaine sans surcoût.

La Délégation régionale de la santé joue un rôle pivot dans la coordination du projet. Elle assure l’accréditation des formations sanitaires, le suivi technique, la supervision, la vérification et le paiement des prestations. « Nous veillons à la qualité des soins et à la régularité des services rendus. En cas de manquements, des sanctions sont appliquées », précise le Délégué. La gestion des conflits entre patients, prestataires et le fonds régional est également assurée par la délégation, qui agit comme médiateur et garant du bon fonctionnement du système.

À ce jour, 121 formations sanitaires sont accréditées sur les 328 existantes dans la région, soit environ 36% de l’offre locale. Les autres prestations CSU sont délivrées par toutes les structures sanitaires publiques et privées. Côté enrôlement, les résultats sont également prometteurs : 78 à 79% des cibles sont atteintes, avec un taux de couverture de 100% pour les accouchements, les patients tuberculeux et ceux vivant avec le VIH. Au deuxième trimestre 2025, on enregistre 1550 premières consultations prénatales, 900 échographies et 662 accouchements assistés. « La progression est notable. Un tiers des femmes font leurs consultations prénatales. L’enjeu est maintenant de les maintenir dans le circuit jusqu’à l’accouchement », souligne Charles Youpdoi.

Le projet CSU, avec le chèque santé en fer de lance, a été conçu grâce au partenariat germano-camerounais. La coopération allemande, à travers la GIZ, fournit un appui technique, logistique et financier, notamment pour l’extension dans le Sud et l’Est. Un soutien précieux, surtout pour les formations sanitaires mobiles, les sessions de renforcement des capacités, et l’accompagnement dans le plaidoyer régional. « L’assistance technique vit avec nous les réalités du terrain et apporte des réponses efficaces », confie le Délégué.

Malgré les avancées, plusieurs défis subsistent. En premier lieu, les problèmes d’accessibilité aux formations sanitaires, souvent isolées par des routes impraticables. S’y ajoutent les difficultés de saisie numérique des prestations : près de 30% des centres de santé sont dans des zones non électrifiées ou non couvertes par le réseau télécom. La mise en place d’un système de saisie hors ligne est en cours, grâce au partenariat avec la GIZ. Le manque de personnel sanitaire reste aussi une préoccupation majeure, bien que de nouveaux recrutements soient attendus.

La dynamique enclenchée par le chèque santé dans la région du Sud montre que la CSU peut produire des résultats tangibles. Avec des prestations gratuites ou à coût réduit, une meilleure coordination technique, un appui stratégique des partenaires et une implication accrue des communautés, la santé devient progressivement plus accessible. Pour Charles Youpdoi, l’heure est à la consolidation : renforcer la sensibilisation, élargir les accréditations, garantir l’efficacité des prestations, et surtout, ne laisser aucun bénéficiaire de côté.

Clarance BIYICK 

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